La neurodynamique appliquée à l’ostéopathie

A l’état normal, le tissu nerveux n’est pas sensible aux stimulations mécaniques générées par les mouvements des membres et du rachis.

Si un nerf est irrité, il deviendra mécanosensible et son élongation sera source de douleur. Si un nerf est irrité par compression (sténose), il sera source de paresthésies ou dysesthésies.

A l’inverse du tissu conjonctif, l’étirement ou la compression favorisent l’ischémie du tissu nerveux. C’est pourquoi des tests cliniques et des techniques thérapeutiques spécifiques ont été élaborés. Ils nous sont présentés par Philip Moulaert, ostéopathe spécialiste de la prise en charge des atteintes des nerfs périphériques.

L’examen complet qu’il propose a pour objectif d’évaluer l’implication des systèmes musculaire, articulaire, disco-dural et neural dans les atteintes du système neuroméningé. Il prend également en compte l’implication du système biopsychosocial pour les atteintes chroniques.

Pour évaluer la composante neurale dans le cas d’une lombosciatique ou d’une cervico-brachialgie, il faut d’abord exécuter des tests de reproduction de la douleur qui permettent d’évaluer la mécanosensibilité du nerf.

Dans un deuxième temps, on évaluera la fonction même du nerf à l’aide de tests de conduction nerveuse (tests des réflexes, de la force et de la sensibilité cutanée).

Une diminution ou abolition d’un de ces paramètres est un signe de neuropathie périphérique.

Dans le cadre de la consultation ostéopathique, les atteintes neurales les plus fréquentes sont des augmentations de mécanosensibilité neurale sans atteinte de la fonction neurale (la conduction de l’influx nerveux n’est pas altérée).

Dans cette situation clinique, il n’y a pas d’atteinte pathologique du nerf lui-même : c’est le tissu conjonctif périneural qui est irrité.

Si les nerfs sont impliqués dans la douleur du patient, il faut les « provoquer ». Des tests cliniques ont été élaborés par Robert Elvey, thérapeute manuel et directeur pédagogique du département de thérapie manuelle au sein de l’University de Curtin à Perth (Australie). Ils reposent sur la neurobiomécanique, c’est à dire l’étude du mouvement du tissu neural dans le corps humain et son comportement face aux contraintes biomécaniques.

Kinésithérapeute de formation, Philip Moulaert s’est d’abord formé à la médecine orthopédique Cyriax et à la thérapie manuelle (Norvégienne) avant de suivre une formation en ostéopathie en France (1979-1984) ainsi qu’une spécialisation en neurodynamique à Perth en Australie.

Pourquoi vous êtes-vous tout particulièrement intéressé au tissu neuro-méningé ?

Dès le début de ma carrière, j’avais des interrogations sur l’examen et le traitement des douleurs irradiantes. Je comprenais mal ce problème. À cette époque, la thérapie manuelle proposait des solutions au niveau articulaire, mais rien pour les indications d’origine nerveuse. J’ai alors découvert les articles de Robert Elvey, qui avait mis en place, dès la fin des années 70, une approche thérapeutique du tissu neuroméningé.

Il a inventé un examen clinique spécifique des nerfs périphériques pour la prise en charge des cervico-brachialgies, lombosciatiques et cruralgies.

Quelles sont les spécificités de ces tests élaborés par Robert Elvey ?

Le test de Slump élaboré par Maitland et utilisé dans le bilan des lombosciatalgies sert à analyser la relation entre la dure-mère, les nerfs périphériques et le disque intervertébral.

Robert Elvey a mis en place le premier arbre décisionnel permettant de déterminer si la cause d’une douleur irradiant dans le quadrant supérieur ou inférieur est plutôt d’origine nerveuse, musculaire ou articulaire. Il s’est appuyé sur la neuro-biomécanique et a jeté les bases d’un traitement des dysfonctions nerveuses fondées sur une approche physiologique, contrairement aux approches mécaniques très répandues à l’époque (basée sur les étirements des nerfs par le biais du mouvement des membres).

Comment cette approche intègre-t-elle les fascias des nerfs, souvent manipulés par les ostéopathes ?

Les traitements concernant les fascias des nerfs sont basés sur l’harmonisation de la densité des tissus alentour. Il s’agit la plupart du temps de stimulation mécanique d’étirement, qui correspond à un autre paradigme : le traitement du tissu conjonctif.

D’autre part, l’approche fasciale des nerfs périphériques ne propose pas de diagnostic spécifique. Lorsqu’on prend en charge une véritable atteinte du tissu neural, il est nécessaire d’identifier la cause sous-jacente, d’établir une classification de la lésion en présence pour traiter ou orienter le patient au mieux.

En neurodynamique, nous avons des techniques de revascularisation du nerf, d’ouverture foraminale ou encore de glissement du nerf dans sa gaine, de correction des mouvements ou postures neuro-irritantes, etc. Toutes respectent cette obligation de ne pas créer d’étirement sur le nerf.

Extrait de l’article « la neurodynamique appliquée à l’ostéopathie » http://www.osteomag.fr